Journal de bord d’un début de crise sanitaire, par Jacques Fleurentin

par Jacques Fleurentin
(29 mars 2020)

1) Des nouvelles du front : 18 mars 2020

Les virus cohabitent depuis des millions d’années en équilibre avec leurs hôtes.

La disparition des écosystèmes et d’habitats spécifiques les pousse à changer d’espèce : pigeon, souris, cochon, poulet, chauve souris…. Ils s’adaptent et mutent facilement changeant leurs antigénicités (caractéristiques) et rendant ainsi les défenses naturelles plus compliquées.

 

Il y a des virus à ADN (herpès, variole) et des virus à ARN (grippe, coronavirus). Le virus de la grippe (ou virus influenza) comporte huit molécules d’ARN qui se trouvent dans une capside protéique, à l’intérieur d’une enveloppe.

Ce virus influenza se transmet par voie aérienne.

Il existe 3 types de virus influenza : A, B et C. Les virus A et B sont responsables des épidémies de grippe saisonnière. Les virus B et C sont présents chez l’Homme alors que les réservoirs des virus A circulent chez différents animaux.

Ainsi, lors de la Première Guerre Mondiale, le virus de la grippe des oiseaux a très probablement muté deux fois et, à la faveur d’interactions de populations aviaires (souvent des canards), porcines et humaines, il a infecté des cochons et des hommes. En fait, le modèle paysan d’alors mettait en contact direct et continuel les oiseaux de basse-cour, les porcs et les humains. Les porcs normalement ne craignent pas les virus des canards du fait de la barrière des espèces mais dans un contact permanent, le virus peut muter et donc s’adapter au nouveau système immunitaire. Le porc et l’homme ayant des systèmes immunitaires assez proches, le virus peut atteindre notre espèce assez facilement.

Une première vague a sans doute déferlé en France dans les années 16-17 mais c’est aux Etats-Unis, dans un camp militaire que les premiers cas sont officiellement enregistrés en mars 1918. L’épidémie gagne rapidement l’Europe en guerre par les mouvements de troupes. Au fil des mutations, le virus devient plus contaminant et dangereux et fera des millions de morts.

Un nouveau virus, du genre Coronavirus, appelé SRAS-COV, est apparu en Chine en 2002 ; c’est un virus ARN enveloppé qui produit des nouveaux variants. Quand il devient pathogène on l’appelle SRAS (Syndrome Respiratoire Aigu Sévère). Les particules virales présentent des protubérances de surface leur donnant un aspect « en couronne » (corona, en latin) qui a servi à la dénomination de ces virus.

Le réservoir animal du SRAS-COV a été identifié comme étant une chauve-souris insectivore. L’hôte intermédiaire qui a permis le passage du virus à l’homme est la civette palmiste masquée, animal sauvage vendu sur les marchés et consommé au sud de la Chine.

Il se transmet d’homme à homme par l’air, probablement par des gouttelettes de salive contaminées.

Ce virus a été récemment rebaptisé SRAS-CoV-1 car un nouveau coronavirus est apparu en Chine en 2019 : le coronavirus covid-19 appelé également SRAS-CoV-2 ou en anglais SARS-CoV-2.

Nous avons maintenant des données plus précises sur ce coronavirus. Par chance, le SRAS CoV-2 a les mêmes modes d’adhésion à la membrane de la cellule cible que le SRA-CoV-1 : le récepteur ACE2 de l’enzyme de conversion (une enzyme qui régule la tension artérielle dans notre corps). Nous pouvons ainsi bénéficier des données chinoises sur les traitements mis en place en Chine pour le SRAS-Cov-1 :

  • Adhésion sur cellule cible
    Les cellules cibles sont les cellules ciliaires de la trachée artère et pulmonaires puis immunitaires des poumons
  • Le virus se réplique abondamment dans les cellules envahies et contamine d’autres cellules
  • Emballement du système immunitaire : cytokin storm = tempête de médiateurs.
    Le virus induit un relargage massif des médiateurs de l’immunité et de l’inflammation induisant la destruction des alvéoles pulmonaires, œdème et exsudat.
    L’accumulation d’angiotensine II libère des radicaux libres et dégrade les cellules épithéliales vasculaires et immunocompétentes : atteinte rate, lymphe…

Le confinement proposé est le seul moyen actuel pour ralentir la diffusion du virus.

  

2) Prévention suggérée : 19 mars 2020

J’ai compulsé une documentation sur les plantes et les huiles essentielles et voilà ce que je prends à titre personnel et ma famille.

Nous avons quelques données expérimentales intéressantes effectuées dans des expériences in vitro mais aucune preuve d’activité en clinique chez l’homme.

Il est évident que les mesures de confinement et d’hygiène restent prioritaires et fondamentales pour juguler cette épidémie.

Diffusion atmosphérique : Huile Essentielle (HE) Eucalyptus globulus

  • En prévention

– 3 à 5 HE antivirales : arbre à thé, niaouli, laurier noble, eucalyptus radié, citronnier (hépatoprotecteur) = 3 gouttes du mélange sur un sucre le matin

– autres huiles essentielles possibles : saro, ravintsara

– EPS (extraits) : cyprès et astragale de Mongolie = 1 c à café le matin dans eau

– Vitamine D et 1 ampoule de Cuivre oligoélément éventuellement.

  • En cas de sorties à l’extérieur ou de rhume

– toutes les heures : inhalation 1 min de 2 gouttes d’une HE sur un mouchoir
(HE arbre à thé, ravintsara, saro, niaouli, thym linalol) ou de spray Brume aromatique ou autre

 

3) Petites nouvelles du front : 20 mars 2020

 Mesures prises en Chine dès le début de l’épidémie (nous en sommes encore loin) :

– Pour sortir mettre des habits spécifiques : chaussures, vêtements, casquette, masque, gants… Quand on rentre à la maison, se déshabiller à l’extérieur, laisser les habits à l’extérieur, puis se laver les mains.

– Tous les 2 jours, laver les vêtements à 60° ou 2h à 45°.

– Pour le linge éventuellement contaminé, le laisser 3 jours puis lavage.

– Les habitants des villes sont livrés à domicile en 24h, organisé par l’état.

– Décontamination avec pulvérisateur de tous les magasins ou entreprises le soir quand il n’y a plus personne, ainsi que les entrées et couloirs des habitations. Les mesures sont pratiquées dans les entreprises stratégiques, tout le personnel est équipé de masque et de gants.

– Le gel hydroalcoolique ou le savon de Marseille est parfait pour les mains. L’alcool 70 dénaturé et l’eau de javel sont de bons désinfectants des surfaces.

– Chaque personne prend un mouchoir mis à disposition dans les ascenseurs pour ne pas se contaminer en touchant les boutons.

Il n’y a pas de consensus scientifique sur la durée de survie du virus sur les surfaces métalliques, plastiques, carton, bois… Certains parlent de plusieurs jours (3 à 5).

Renforçons nos mesures de protections.

 

4) Les origines de la maladie : 22 mars 2020

La nouvelle maladie émergente Covid-19 (Coronavirus disease 2019) est due à un coronavirus (SARS-CoV-2) dont la chauve-souris est un réservoir naturel. Non affecté, ce mammifère volant peut transmettre de nombreux virus à d’autres espèces, dont l’espèce humaine. C’est son adaptation au vol qui favoriserait sa résistance par augmentation de température et renforcement de ses défenses immunitaires, peut-être lié à une diminution des interférons. Ses défenses naturelles, son immunité lui permettent de contenir la dangerosité du virus qui se recombine ensuite et mute pour devenir contaminant pour d’autres espèces.

Le passage du virus de la chauve-souris à l’homme est lié à des modifications des écosystèmes dues aux activités humaines rapprochant homme, animaux domestiques et chauve-souris. Le point de départ de l’épidémie du SRAS-1 est lié aux marchés chinois d’animaux vivants. Les animaux hôtes intermédiaires entre la chauve-souris et l’homme seraient la civette, le chien viverrin, le blaireau.

Des scientifiques chinois et américains avaient signalé en 2015 les risques d’apparition de nouvelles épidémies et pointaient la Chine comme origine.

 

5) Covid-19 : l’analyse des génomes révèlerait une origine double du virus : 23 mars 2020

(The conversation d’après Alexandre Hassanin)

Les 27 premiers cas de contaminés de Wuhan en décembre 2019 ont fréquenté le marché aux animaux de Wuhan mais pas le premier contaminé. Celui-ci a pu être contaminé en novembre.

Génétiquement, le système d’accrochage du virus aux cellules humaines (récepteur ACE-2) du SRAS de la chauve-souris est différent du SRAS du pangolin. Et seul le virus hébergé par le pangolin pourrait contaminer l’homme. Le SRA-2 de la chauve-souris aurait donc muté chez le pangolin pour pouvoir contaminer l’homme. Ce virus se serait recombiné à un autre virus déjà présent chez le pangolin.

 

6) Traitements hydroxychloroquine et chloroquine : petites nouvelles du 24 mars 2020

Une certaine confusion règne sur les plateaux médiatiques en confondant hydroxychloroquine (Plaquenil) et chloroquine (Nivaquine), ces deux médicaments différents obtenus par synthèse sont proches du point de vue chimique, ils n’existent pas dans la nature.

L’hydroxychloroquine est un immunomodulateur prescrit dans des pathologies auto-immunes comme la polyarthrite rhumatoïde et le lupus érythémateux, « c’est un antirhumatismal d’action lente ayant des propriétés antalgiques et anti-inflammatoires » (Vidal).

Ce médicament présente des précautions d’emploi et des effets secondaires : déficit en G6PD (enzyme indispensable à la survie des globules rouges), insuffisance rénale et hépatique, psoriasis, porphyrie (présence importante de molécules précurseurs de l’hème de l’hémoglobine). Des effets secondaires toxiques existent vis-à-vis de la rétine et de la formule sanguine, une surveillance s’impose.

Plaquenil : 4,17 € la boite de 30 comprimés dosés à 200 mg

 

La chloroquine est un antipaludéen, il détruit le parasite (Plasmodium) de la malaria ou paludisme, quand il est présent dans les globules rouges. La chloroquine se concentrerait dans les globules rouges parasités et formerait un complexe toxique pour le parasite.

Elle s’utilise aussi dans des pathologies auto-immunes.

Des précautions sont nécessaires en cas de psoriasis, d’épilepsie, de porphyrie, de déficit et G6PD et d’insuffisance rénale ou hépatique. Des troubles cardiaques peuvent apparaître et nécessiter l’arrêt du traitement.

La Nivaquine est prescrite en prévention et en traitement du paludisme.

Je prenais ce médicament en prévention (100 mg/j) lors de mes voyages de jeunesse et je l’ai pris pendant 3 années consécutives quand j’étais au Yémen car le plasmodium n’était pas encore résistant à la chloroquine. Il est contre-indiqué avec les maladies de la rétine sauf en cas de traitement urgent.

Aujourd’hui de nombreuses zones sont infestées par des plasmodium résistants : l’OMS divise le monde par pays en 3 zones : zone 1 pas de résistance, zone 2 résistance présente, zone 3 résistance élevée.

Nivaquine : 2,40 € boite de 20 comprimés dosés à 1090 mg

Le seul laboratoire français qui fabrique la Nivaquine (Famar, 320 salariés) est en redressement judiciaire faute de repreneur ! Hallucinant. Quand on a des médicaments peu coûteux, les investisseurs ne se bousculent pas. Pourtant là aussi la diversité des médicaments mis au point et ayant fait leurs preuves devrait être conservée, c’est comme la biodiversité.

Une première étude chinoise avec la chloroquine publiée le 19 février 2020 a mené un essai clinique sur une centaine de patients avec des améliorations des images radiologiques et la diminution de la durée d’hospitalisation.

Le Pr. Raoult de Marseille a testé l’hydroxychloroquine et l’a administrée chez 24 patients atteints du virus : 6 jours après le virus a disparu chez 75% des patients. Les non-traités sont porteurs du virus à 90% après 6 jours.

Ces essais ne sont certes pas suffisants mais ils montrent un impact sur le virus. Des études cliniques de plus grande ampleur sont en cours.

Ces médicaments sous prescription obligatoire sont indisponibles actuellement en pharmacie.

 

7) Abandon de nos compétences industrielles dans le domaine du médicament : 26 mars 2020

60% des matières premières pharmaceutiques sont fournies par l’Inde et la Chine.

L’Inde est le 1er producteur de génériques au monde et la Chine fournit 70% des substances actives.

Depuis 2011, l’Académie de pharmacie dénonce les effets pervers de la délocalisation et de la mondialisation : la perte d’indépendance de l’Europe en source d’approvisionnement des matières actives pharmaceutique et perte du savoir-faire. On l’a vu déjà en temps normal avec les ruptures récurrentes de médicaments en pharmacie.

Prenons l’exemple du paracétamol : 60 % de la production mondiale vient de Chine. La dernière usine en France (Isère) de fabrication du Doliprane de Sanofi, fleuron de l’industrie pharmaceutique française, a fermé ses portes en 2008. C’était la dernière unité de production en Europe à fabriquer du paracétamol (Le Quotidien du pharmacien, n°3579).

La Chine redémarre mais a baissé sa production et l’Inde entre en confinement généralisé.

 

8) Rupture de stock de curare en réanimation : 28 mars 2020

Nous avons appris que certains hôpitaux manquent de curare.

C’est un médicament préparé à partir de plantes toxiques (Chondrodendron, Curare, Strychnos…) toutes originaires des forêts tropicales de l’Amérique du Sud.

Les colons espagnols l’ont découvert à leurs dépends, ils l’appelaient « la mort volante » ; touché par une flèche lancée avec une sarbacane empoisonnée au curare, l’individu ressent ses jambes le lâcher et il s’affaisse ; le curare empêche la transmission nerveuse nerf muscle.

Puis la paralysie gagne lentement tous les muscles pour finalement atteindre les muscles de la respiration. L’individu meurt asphyxié en pleine conscience jusqu’au dernier souffle.

Les Amérindiens avaient découvert les effets toxiques de ces curares utilisés comme poison de chasse ou de guerre.

En anesthésie, le curare ou des dérivés d’hémisynthèse, permet de faciliter les intubations respiratoires et d’obtenir une bonne résolution (décontraction) musculaire, il est utilisé en adjuvant des anesthésiques.

Des plantes médicinales restent des ressources thérapeutiques parfois irremplaçables.